Dans la rafale, au loin, la neige à flot pressée
Roule sur le désert ses tourbillons glacés
L'horrible giboulée aveugle; le froid mord
La nuit s'approche aussi - la sombre nuit du Nord
Des voyageurs là-bas, affrontent la bourrasque
L'ombre les enveloppe et le brouillard les masque
Ils vont, toujours traçant leur immortel sillon
Au pôle, s'il le faut, planter leur pavillon
Il fallait étouffer les oursons au repaire
Et d'Iberville, un fort que rien ne désespère
Avec cent compagnons armés jusqu'aux dents
Malgré la saison rude et ses grands froids mordants
À travers des milliers d'obstacles fantastiques
Avait pris le chemin des régions arctiques
Pour reprendre à l'Anglais ces postes importants
Il fallait prévenir les secours du printemps
Sans un sentier battu, sans guide, dans jalons
Ils franchirent les monts, les ravins, les vallons
Précipice ou torrent, forêt ou fondrière
Rien ne peut entraver leur course aventurière
Les canots sur l'épaule et les raquettes aux pieds
Ces fiers coureurs des bois, ces chasseurs, ces troupiers
Semblaient, dans les brouillards de ce ciel nébuleux
Les fantômes errants d'un monde fabuleux
Puis le verglas fangeux, que le printemps fait fondre
Change en marais glacé la route qui s'effondre
Nul ne recule un jour dans un torrent qui gronde
D'Iberville lui-même est englouti sous l'onde
Il s'échappe, mais deux braves sont noyés
Plus tard quand le héros rentra dans ses foyers
Il avait arraché trois forts à l'Angleterre
Conquit toute une zone, et sur mer et sur terre