Y a tout à l'heure, quinze ans d'malheur, mon vieux Léon
Que tu es parti au paradis d'l'accordéon
Parti bon train, voir si l'bastringue et la java
Avaient gardé droit de cité chez jéhovah
Quinze ans bientôt qu'musique au dos, tu t'en allais
Mener le bal à l'amicale des feux follets
En cet asile, par sainte-cécile, pardonne-nous
De n'avoir pas su faire cas de ton biniou
C'est une erreur mais les joueurs d'accordéon
Au grand jamais, on ne les met au panthéon
Mon vieux, tu as dû t'contener du champ de navets
Sans grandes pompes et sans pompons et sans ave
Mais les copains suivaient l'sapin, le cœur serré
En rigolant, pour faire semblant de n'pas pleurer
Et dans nos cœurs, pauvre joueur d'accordéon
Il fait ma foi, beaucoup moins froid qu'au panthéon
Depuis mon vieux, qu'au fond des cieux, tu as fait ton trou
Il a coulé de l'eau sous les ponts de chez nous
Les bons enfants d'la rue de vanves à la gaîté
L'un comme l'autre, au gré des flots, furent emportés
Mais aucun d'eux n'a fait fi de son temps jadis
Tous sont restés du parti des myosotis
Tous ces pierrots ont le cœur gros, mon vieux Léon
En entendant le moindre chant d'accordéon
Quel temps fait-il chez les gentils de l'au-delà
Les musiciens ont-ils enfin trouvé le la
Et le p'tit bleu, est-c'que ça n'le rend pas meilleur
D'être servi au sein des vignes du seigneur
Si d'temps en temps, une dame d'antan s'laisse embrasser
Sûrement papa, que tu regrettes pas d'être passé
Et si l'bon dieu aime tant soit peu l'accordéon
Au firmament, tu t'plais sûr'ment, mon vieux Léon