Si vous vous contentiez Madame,
De rendre le roi fou de vous.
L'Amour étant l'affaire des femmes,
Nous n'en aurions aucun courrou.
Comprenez-vous ?
Mais, depuis quelques temps Marquise,
Vous voulez gouverner en tout.
Laissez moi dire avec franchise
Que ce n'est pas de notre goût.
Comprenez-vous ?
Que vous nommiez deux emminences,
Et des abbés tout votre sou,
Que vous regentiez les finances,
Après tout le soldat s'en fout.
Comprenez-vous ?
Mais quand vous nommez pour la guerre
Certain général archi-fou.
Il est normal que l'militaire
Vienne un peu vous chercher des poux.
Comprenez-vous ?
Parce qu'un beau soir à Versailles
Vous avez jouer les touches à tout.
Nous avons perdu la bataille,
Et moi je n'ai plus qu'un genou.
Comprenez-vous ?
Je ne suis pas méchant Marquise.
Mais vous savez, j'aimais beaucoup
Tous ces amis qui sous la bise
Ce soir ne craignent plus le loup
Comprenez-vous ?
Je l'aimais bien mon Capitaine
Il est tombé percé de coups
C'était un bon gars de Tourraine
Il ne rira plus avec nous
Comprenez-vous ?
Tous ces amis chère Marquise
Seraient aujourd'hui parmi nous
Si vous n'aviez nommé sous bises
Cet incapable, ce filou.
Comprenez-vous ?
Car ce n'est pas un jeu la guerre,
Madame, il s'en faut de beaucoup.
On peut y perdre comme mon frère,
Ses entrailles sur les cailloux.
Comprenez-vous ?
Mais je ne fais pas de manières
Et si je pleure devant vous
C'est que mon père est dans la terre
Et que ma soeur n'a plus d'époux
Comprenez-vous ?
Du sang de mes chers camarades,
Un ruisseau rougit tout à coup.
Aucun poisson ne fut malade
Car les poissons avalent tout.
Comprenez-vous ?
Mais quand nous n'aurons plus de larme
Quand nous serons à bout de tout
Nous serons bien à qui Madame
Il nous faudra tordre le cou
Comprenez-vous ?